Le pavillon de Gustave Flaubert : le refuge d’un génie littéraire
18 Quai Gustave Flaubert Canteleu
Le pavillon Flaubert de Croisset est le dernier vestige d’une maison aujourd’hui disparue. C’est ici, dans ce lieu qui borde la Seine, que Gustave Flaubert a écrit quelques-unes de ses plus grandes œuvres. Découvrez comment cette maison familiale est devenue au fil du temps un refuge qui a façonné la vie et l’œuvre d’un des plus grands écrivains français.
L'HISTOIRE EN BREF
Flaubert et la maison du Croisset
Le jeune Gustave Flaubert vers l'age de 13 ans
En 1844, le père de Gustave Flaubert, Achille-Cléophas, achète une élégante maison du XVIIe siècle à Croisset, près de Rouen. Cette acquisition fait suite à l’expropriation de leur maison familiale de Rouen, située à l’Hôtel-Dieu, en raison des travaux de construction de la ligne de chemin de fer reliant Paris, Rouen et Le Havre. Initialement résidence secondaire, la maison de Croisset devient leur domicile principal après ce déplacement forcé. Autour de la maison, le jardin en terrasses mêlait harmonieusement nature et culture : des pelouses soigneusement entretenues, des parterres débordants de fleurs, une haie de rosiers embaumant l’air, et un verger où pommiers et poiriers donnaient leurs fruits. Une allée bordée de tilleuls majestueux montait vers les collines boisées environnantes, tandis qu’un charmant pavillon Louis XV, situé près du fleuve, servait de lieu de contemplation. Ces premières années au bord de la Seine forgent un lien indéfectible avec ce lieu, qu’il décrira plus tard comme son « refuge absolu ».
Dès l’âge de 10 ans, Gustave Flaubert découvre Croisset, un lieu qui deviendra une source inépuisable d’inspiration. Enfant curieux et rêveur, il explore les jardins, observe les bateaux sur la Seine et développe son goût pour les histoires. Ce cadre paisible aiguise son sens de l’observation, un trait qui marquera profondément son style littéraire. Devenu adulte, il installe son célèbre cabinet de travail au premier étage. Une pièce spacieuse baignée de lumière, avec cinq grandes fenêtres offrant une vue imprenable sur le jardin et la Seine. Son bureau est décoré d’objets exotiques, d’un divan recouvert d’une peau d’ours, et d’une grande bibliothèque en chêne dans laquelle sont rangés près de 700 ouvrages. Ce décor inspira profondément Flaubert, qui trouva dans cet écrin de sérénité un cadre idéal pour sa créativité.
Des nuits blanches pour des chefs-d’œuvre
Maison des Flaubert à Croisset vue de la Seine par Franklin-Grout, Caroline (1846-1931) / BNF - Gallica
Après la mort de son père en 1846, Flaubert décide de rejoindre sa mère à Croisset. Ce choix est renforcé par sa santé fragile, marquée par une crise nerveuse qui met fin à ses études de droit. Il s’y installe définitivement en 1851, choisissant la tranquillité de Croisset pour se consacrer entièrement à sa vocation littéraire. C’est dans son cabinet de travail que Flaubert écrit quelques-unes de ses plus grandes œuvres. Un bureau dans lequel il passe des nuits entières à écrire, dans une ambiance intimiste, éclairée par la lueur de deux lampes tamisées et entouré des objets exotiques ramenés de ses voyages. Le jour, Flaubert perfectionne ses phrases avec des méthodes devenues légendaires. Ainsi, dans l’allée des tilleuls qu’il appelle son "gueuloir", il lit à haute voix ses textes pour en tester la musicalité. Cette rigueur donne naissance à des chefs-d’œuvre tels que Madame Bovary (1857), qui scandalise par son réalisme, et Salammbô (1862), inspiré par ses voyages en Orient.
Malgré son apparente réclusion, Croisset devient aussi un lieu de rencontres littéraires. Des figures majeures de son époque, telles que George Sand, Guy de Maupassant, Ivan Tourgueniev, les frères Goncourt, Émile Zola, Théophile Gautier et Alphonse Daudet, visitent la maison. Ces invités se retrouvent souvent dans le pavillon Louis XV, situé près de la Seine, un lieu propice à la réflexion et aux conversations intellectuelles. Ce petit salon offrait un cadre intime pour débattre de littérature, de philosophie et des grandes questions de leur temps, à l’abri de l’agitation parisienne. Pourtant, la solitude reste une constante dans la vie de Flaubert, accentuée par la présence austère de sa mère, à qui il est profondément attaché.
Un lieu à la mémoire de Flaubert
Paysage devant la maison de Flaubert à Croisset en 1874.Rochegrosse, Georges (1859-1938). Peintre / Source BNF- Gallica
La fin de vie de Gustave Flaubert à Croisset est marquée par des épreuves personnelles. En 1872, la mort de sa mère, à qui il était profondément attaché, le plonge dans une grande solitude. Bien que sa nièce Caroline lui apporte un soutien affectueux, Flaubert vit de plus en plus reclus, accablé par des dettes familiales et des difficultés à trouver un large public pour ses œuvres. Malgré tout, il reste fidèle à Croisset, où il poursuit son travail littéraire jusqu’à sa mort soudaine en mai 1880, victime d’une hémorragie cérébrale dans son cabinet de travail.
Après sa disparition, la maison de Croisset est vendue en 1881 et détruite pour faire place à une distillerie, un symbole brutal de l’industrialisation triomphante face à l’héritage littéraire. Seul le pavillon Louis XV, autrefois lieu de contemplation et de discussions, échappe à la destruction. Aujourd’hui transformé en musée, il abrite des objets personnels de l’écrivain : son fauteuil où il passait de longues heures à réfléchir, ses plumes témoins de ses nuits d’écriture, des portraits, et le célèbre perroquet d’Un cœur simple, devenu une icône littéraire. Bien que la maison principale ait disparu sous les coups de l’industrialisation, le pavillon Louis XV, préservé et transformé en musée, perpétue la mémoire de Croisset. Ce lieu unique incarne à la fois la solitude créative de Flaubert et l’immortalité de son génie littéraire.
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