Hélène Jégado : la plus grande tueuse en série était bretonne

Esp. Charles de Gaulle Rennes Ille-et-Vilaine

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Hélène Jégado, cuisinière bretonne du XIXe siècle, a empoisonné des dizaines de victimes avec de l’arsenic, dissimulant ses crimes à travers les épidémies de choléra qui frappe la Bretagne. Considérée comme la plus grande tueuse en série de l'histoire française, elle finira guillotinée le 26 février 1852 à Rennes sur l’ancien Champ de Mars, actuelle esplanade Charles-de-Gaulle. son procès et son exécution ont marqué la Bretagne et laissé une empreinte durable dans l’imaginaire collectif.


L'HISTOIRE EN BREF

Hélène Jégado, l’ombre de l’Ankou rode en Basse-Bretagne


Gravure de 1844 représentant l'Ankou venant récupérer les âmes des défunts

Née en 1803 dans une modeste ferme de Plouhinec, Hélène Jégado grandit dans un environnement rural imprégné des croyances populaires bretonnes. L’une d’elles, celle de l’Ankou, laisse une empreinte indélébile sur son esprit. Représenté comme un squelette ou un vieil homme lugubre portant un chapeau large, l’Ankou est perçu comme le serviteur de la mort, celui qui accompagne les âmes vers l’au-delà. Traumatisée par cette figure dès l’enfance, Hélène s’imagine être son incarnation sur Terre, croyant qu’elle a été choisie pour accomplir son sombre dessein. Après le décès de sa mère en 1810, Hélène est envoyée chez une tante à Bubry, où elle devient domestique. Décrite comme caractérielle, grossière et imprévisible, elle suscite méfiance et curiosité dans son entourage.

 En 1833, elle entame sa série meurtrière à Guern, où elle empoisonne à l’arsenic ses premières victimes : sa sœur Anna, le curé Le Drogo pour qui elle travaille, ainsi que plusieurs membres de leur entourage. Jouant la soignante dévouée, Hélène détourne les soupçons avec une habileté troublante. Profitant de l’épidémie de choléra qui ravage la région et provoque vomissements et douleurs abdominales, elle masque astucieusement ses crimes derrière des symptômes similaires à ceux d’un empoisonnement à l’arsenic, rendant ses meurtres presque indétectables. À l’époque, ce poison, alors couramment utilisé comme mort-aux-rats, devient pour Hélène l’arme idéale, à la fois discrète et imparable.

Une série de meurtres dissimulés par le choléra


Croquis d'Hélène Jégado d'après une statuette de P. Bouchinot en 1852.

Entre 1833 et 1851, Hélène Jégado parcourt la Bretagne, semant la mort dans son sillage. De Guern à Lorient, en passant par Auray, Hennebont et Pontivy, elle travaille comme cuisinière dans des presbytères, des maisons bourgeoises et même un bordel militaire. Ce rôle stratégique lui permet d’avoir un accès direct aux repas de ses victimes, qu’elle empoisonne avec une discrétion redoutable. À chaque nouveau crime, elle quitte brusquement son emploi, emportant parfois des souvenirs des défunts, avant de reprendre son sombre dessein ailleurs. Ses déplacements incessants et son apparente piété lui permettent de rester longtemps au-dessus de tout soupçon.

C’est à Rennes, en 1851, que sa série meurtrière prend fin. Après une série de décès suspects dans le foyer où elle est employée, Théophile Bidard de La Noë, avocat et professeur de droit renommé, commence à suspecter un empoisonnement. Poussé par ses doutes, il demande une autopsie sur l’une des victimes. Les analyses menées par Faustino Malaguti, chimiste de la faculté des sciences de Rennes, révèlent des traces d’arsenic, confirmant ses soupçons. Le 2 juillet 1851, Hélène Jégado est arrêtée, mettant un terme brutal à une carrière criminelle qui aura marqué la Bretagne pendant près de deux décennies.

Un procès et une postérité troublante


Gravure d'Hélène Jégado à son procès encadrée par deux gendarmes (Épinal, imprimerie Pellerin, 1852).

Le procès d’Hélène Jégado, ouvert le 6 décembre 1851 à Rennes, est rapidement qualifié d’affaire criminelle exceptionnelle. Accusée de cinq empoisonnements, cinq tentatives et onze vols domestiques, elle échappe pourtant à la justice pour de nombreux autres meurtres, prescrits par la loi. Défendue par le jeune avocat Magloire Dorange, qui plaide la folie et met en avant son obsession pour l’Ankou, Hélène reste implacable et glaçante devant la Cour d’assises d’Ille-et-Vilaine. Les preuves toxicologiques apportées par Faustino Malaguti, chimiste de la faculté des sciences de Rennes, ainsi que les récits troublants des témoins, suffisent à convaincre les jurés. Après seulement une heure et quinze minutes de délibération, elle est condamnée à mort.

Le 26 février 1852, sous un ciel gris, une foule silencieuse se rassemble sur le Champ de Mars de Rennes, aujourd’hui l’esplanade Charles-de-Gaulle, pour assister à son exécution. Hélène, décrite comme pieuse, avait la veille confié à l’abbé Tiercelin des aveux mêlant vérités et dénégations, renforçant le mystère autour de sa culpabilité. Sur la première marche de l’échafaud, elle s’arrête longuement pour prier, avant de monter calmement, jetant un dernier regard à l’assemblée. En quelques secondes, la guillotine met fin à sa vie, mais pas à sa légende. Rapidement, son nom inspire comptines, chansons et romans, comme Fleur de tonnerre de Jean Teulé. Aujourd’hui encore, des pâtisseries locales, surnommées « les gâteaux d’Hélène Jégado », rappellent son sombre héritage à travers la Bretagne.


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