La tour Jeanne d’Arc : solide témoin de l’histoire tumultueuse de Rouen
Rue du Donjon Rouen Seine-Maritime
Dominant la ville de Rouen depuis le XIIIe siècle, la tour Jeanne d’Arc est un vestige de l’imposant château de Philippe Auguste. Ce monument, chargé d’histoire, mêle les souvenirs de la guerre de Cent Ans, du procès de Jeanne d’Arc, et des transformations modernes. Plongez dans une fresque historique captivante où se croisent architecture philippienne et mémoire collective.
L'HISTOIRE EN BREF
Le château de Rouen : symbole du pouvoir de Philippe Auguste
Gravure du château féodal de Rouen (Château Bouvreuil), résidence ducale et royale dans la capitale du duché de Normandie.
Après la conquête de la Normandie en 1204, Philippe Auguste, roi de France, lance un ambitieux projet de fortification pour asseoir son autorité sur la région récemment rattachée à la couronne. C’est sur la colline de Bouvreuil, à Rouen, qu’il ordonne la construction d’un château imposant. Le site est stratégique : il domine la ville et s’étend sur les ruines d’un amphithéâtre gallo-romain, symbolisant le triomphe du pouvoir royal sur une région jadis anglaise.
Parmi les dix tours du château, la tour maîtresse, appelée aujourd’hui tour Jeanne d’Arc, incarne l’architecture philippienne dans toute sa splendeur. Avec ses 30 mètres de hauteur, ses murs de plus de 4 mètres d’épaisseur, et son escalier à vis, elle était à la fois un bastion défensif et une résidence symbolique du pouvoir royal. Philippe Auguste ne laisse rien au hasard : le château de Rouen est une des plus grandes forteresses de son règne, illustrant la puissance française en Normandie.
Le jour où Jeanne d’Arc a défié ses juges
Le donjon avant sa restauration. Par J. Légeron — Bulletin des Amis des Monuments Rouennais (1910)
Durant la guerre de Cent Ans, Rouen tombe aux mains des Anglais. En 1431, Jeanne d’Arc, héroïne française capturée à Compiègne, y est jugée pour hérésie. Bien que souvent associée à la tour qui porte aujourd’hui son nom, Jeanne ne fut pas emprisonnée dans ce donjon. C’est dans une autre tour, appelée la tour de la Pucelle, qu’elle est détenue. Cependant, le Donjon joue un rôle décisif dans son procès.
Esquisse de Jeanne d'Arc, réalisé le 10 mai 1429 par en marge d'un registre par Clément de Fauquembergue, greffier au parlement de Paris. Archives nationales, Registre du Parlement de Paris, 1429.
Le 9 mai 1431, Jeanne est conduite au rez-de-chaussée du Donjon. Là, devant des instruments de torture, elle est sommée de céder et de renier sa foi. Mais son courage reste inébranlable. Sa réponse résonne encore : « Même si vous me faisiez écarteler, je ne dirais rien d’autre. » Cette scène symbolise la détermination et la foi d’une jeune femme de 19 ans face à l’adversité. Cet épisode, bien que bref, associe pour toujours la tour au destin tragique de la Pucelle d’Orléans.
La tour Jeanne d’Arc aujourd’hui
Après les guerres de Religion, le château est en grande partie démantelé en 1591, et les terrains sont urbanisés. La tour de la Pucelle disparaît au XIXe siècle, mais le Donjon, bien qu’en ruines, échappe à la destruction. Grâce à une souscription nationale initiée par Achille Deville, inspecteur des Monuments historiques, la tour est classée monument historique en 1840.
Restaurée sous la direction de Louis Desmaret, avec les conseils de Viollet-le-Duc, la tour retrouve son allure majestueuse, surmontée d’une toiture en poivrière, typique du XIVe siècle. Aujourd’hui, la tour Jeanne d’Arc abrite des escape games immersifs, mêlant histoire et divertissement. Des scénarios replongent les visiteurs dans la guerre de Cent Ans ou dans son rôle de bunker durant la Seconde Guerre mondiale. Ce vestige médiéval rappelle les luttes et transformations de Rouen à travers les siècles. Il est plus qu’un monument ; c’est une fenêtre ouverte sur une époque où pouvoir, foi et résilience façonnaient le destin des nations.
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