Les Catacombes de Paris, un rendez vous avec la mort

1 Av. du Colonel Henri Rol-Tanguy Paris

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« Ils furent ce que nous sommes, Poussière, jouet du vent ! Fragiles comme des hommes, Faibles comme le néant ! » Lamartine

Les Catacombes de Paris naissent officiellement Le 7 avril 1786. A l’époque l’endroit est encore "l’Ossuaire municipal de Paris". Pourtant le nom de "Catacombes" va naturellement s’imposer au lieu, celui-ci faisant référence aux célèbres catacombes romaines.

Depuis le jour de leur création, les Catacombes de Paris n’ont cessé de susciter auprès du public, une fascination étrange chez les uns, voir une curiosité morbide pour d’autres. Dans tous les cas, l’engouement est tel que les autorités décident dès 1809, d’ouvrir ce patrimoine unique au public seulement sur réservation, ajoutant ainsi un peu plus de mystère, dans l’esprit de celles et ceux souhaitant partir à sa découverte.

Les Origines des Catacombes de Paris

Un Problème de Salubrité au XVIIIe Siècle

À l'époque où le XVIIIe siècle tirait sa révérence, Paris était aux prises avec de graves enjeux sanitaires dus à ses cimetières surpeuplés. Pour résoudre cette crise, les restes mortuaires furent déplacés dans les profondeurs de la ville. Le choix se porta sur les anciennes carrières de la Tombe-Issoire, situées à l'époque hors des limites de la ville, sous la plaine de Montrouge. De 1785 à 1787, les ossements du cimetière des Saints-Innocents furent les premiers à être transférés dans ce qui allait devenir un monument historique.

Le Choix des Carrières de la Tombe-Issoire

Pour réaliser ce projet d'envergure, les autorités optent pour un site alors en périphérie de la capitale : les anciennes carrières de la Tombe-Issoire, situées sous la plaine de Montrouge. Ces carrières, exploitées depuis le XVe siècle puis abandonnées, ne représentent qu'une petite partie du réseau souterrain qui s'étire sous Paris sur près de 800 hectares.

L'Intervention de Charles-Axel Guillaumot

Charles Axel Guillaumot, inspecteur général des carrières de Paris, est chargé de l'aménagement du site et de la coordination des transferts d'ossements. Ce service, créé par Louis XVI en 1777, avait pour but de prévenir les effondrements qui avaient fréquemment lieu à cette époque.

Le Transfert des Ossements

Les Premières Évacuations

Entre 1785 et 1787, les premiers transferts concernent le cimetière des Saints-Innocents, le plus grand de Paris, qui avait été fermé en 1780 après près de dix siècles d'utilisation. Les restes sont déplacés la nuit pour minimiser l'agitation publique et l'opposition de l'Église.

Les Puits de Service et les Galeries

Les ossements sont acheminés via deux puits de service et sont ensuite méthodiquement répartis et empilés par les ouvriers dans les galeries souterraines. Ces transferts se poursuivent bien après la Révolution, jusqu'en 1814, et reprennent dans les années 1840 et 1859-1860, périodes de grands travaux urbains. Le 7 avril 1786, le site est officiellement désigné comme l'Ossuaire municipal de Paris et adopte le nom de "Catacombes", en hommage aux célèbres catacombes romaines.

L'Évolution des Catacombes de Paris

La mise en scène d’un ossuaire Monumental

Les Catacombes de Paris se distinguent en tant que l'un des plus vastes ossuaires du monde et l'un des rares à être entièrement souterrain. Avant d'accueillir le public en 1809, l'ossuaire municipal a bénéficié d'un aménagement décoratif d'envergure sous la direction de l'inspecteur Héricart de Thury, qui a su transformer ce lieu en un espace à la fois muséographique et monumental.

Les ossements, initialement entassés sans ordre, sont réarrangés avec soin pour former des murs structurés, inspirés des hagues utilisées par les carriers. En façade, les tibias et les crânes s'alternent, créant une esthétique singulière, tandis que les os plus fragmentés sont placés à l'arrière.

Une Dimension Éducative et Réflexive

 

Le parcours est ponctué de monuments maçonnés aux styles antiques et égyptiens, tels que des piliers doriques, des autels, des cippes et des tombeaux. Ces éléments sont baptisés de noms évocateurs tirés de la littérature religieuse, romantique ou de l'Antiquité, comme le sarcophage du Lacrymatoire ou la fontaine de la Samaritaine.

Héricart de Thury a également intégré une dimension éducative au sein des Catacombes en créant des cabinets de curiosités, l'un consacré à la minéralogie, l'autre à la pathologie, ce dernier présentant des spécimens osseux liés aux travaux du docteur Michel-Augustin Thouret. Des plaques ornées de textes religieux et poétiques jalonnent les galeries, invitant à la méditation sur la vie et la mort.

La Recherche Scientifique dans les Catacombes

Un lieu unique à expérimenter

Peu après leur ouverture, les Catacombes attirent l'attention de chercheurs du Muséum national d'histoire naturelle, qui étudient la flore et la faune spécifiques à cet environnement obscur. En 1813, Héricart de Thury mène une expérience avec des cyprins dorés dans le bassin de la fontaine de la Samaritaine, apportant des connaissances précieuses sur la vie aquatique en milieu souterrain.

 

Plus Tard, Félix Tournachon, alias Nadar, réalise en 1861 des expériences photographiques pionnières en utilisant l'éclairage artificiel pour capturer des images des Catacombes. Aujourd’hui encore les recherches continuent, notamment sur les pathologies osseuses, dans le cadre des travaux de consolidation de l'ossuaire. La préservation des ossements dans un environnement humide et le respect du patrimoine humain sont des enjeux majeurs pour les Catacombes.

Tous aux catacombes

L'Ouverture au Public

Dès 1809, les Catacombes s'ouvrent au public, mais uniquement sur rendez-vous. Un registre est mis en place à la fin du parcours pour recueillir les impressions des visiteurs, témoignant rapidement du succès de ces visites.

Au fil des années, l'ossuaire attire de nombreuses personnalités, comme le comte d'Artois en 1787, l'empereur d'Autriche François Ier en 1814, et Napoléon III accompagné de son fils en 1860.

L'Évolution des Modalités de Visite

Tout au long du XIXe siècle, les conditions d'accès aux Catacombes fluctuent, oscillant entre fermetures complètes et ouvertures périodiques. Accessible librement de nos jours, ce monument historique attire plus de 550 000 visiteurs annuellement, témoignant de son statut inébranlable de lieu emblématique de la capitale française.

Alors qu’à l’origine ce lieu servait à résoudre une crise sanitaire, il s’est transformé pour devenir un lieu de contemplation et d'éducation. Ce lieu étrange qui nous rappelle la fragilité de la vie et l'importance de la mémoire, qui défie le temps et les éléments, continue d’attirer les âmes curieuses du monde entier dans ses profondeurs silencieuses. Les Catacombes de Paris sont un témoignage poignant de notre propre mortalité, qui invite chacun de ses visiteurs à une réflexion sur notre existence éphémère.