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15 Rue de Verdun | Bayeux | 14400 | FranceLe 6 juin 1944, Robert Capa est dans les premiers à débarquer sur Omaha Beach. La veille du D‑Day, Capa décide de mettre sa vie en jeu, en choisissant de suivre la compagnie E du 116e régiment d’infanterie américaine.
“Si vos photos ne sont pas assez bonnes, c’est que vous n’êtes pas assez près.”
Robert CapaLeur destination est le secteur Easy Red, l’une des zones les mieux défendues sur Omaha Beach. En effet la plage est surplombée par de nombreux blockhaus et autre nids de mitrailleuses allemands.
Les onze magnifiques
Le 6 juin 1944 les troupes américaines lancent la première vague d’assaut sur Omaha Beach.
Sur cette plage il réalise une série de photos du jour J devenu mythique. Sous le feu allemand, Capa parvient à réaliser 106 photos. Cependant seuls onze d’entre elles sont exploitables après la destruction des négatifs. En effet dans le laboratoire photo du magazine “Life” survient une erreur de traitement qui cause la destruction des négatifs. Cette série de photos s’appelle “les onze magnifiques”.
Cependant, des recherches récentes suggèrent que seules onze photos ont été prises, et qu’aucune d’entre elles ne “manquait” en réalité. Quelque soit la vérité, ces images devenue cultes ont été largement salué à travers le monde. Même le grand réalisateur Steven Spielberg s’en est inspiré pour le tournage du film “Il faut sauver le soldat Ryan”.
Capa d’exil en exil
Miklós Horthy entrant à Budapest à la tête de l’Armée Nationale, le 16 novembre 1919
Robert Capa, de son vrai nom Endre Ernő Friedmann est né en Hongrie en 1913. C’est là qu’il grandit dans une famille juive hongroise. À l’âge de dix-sept ans il est étudiant quand il se fait arrêter par la police. Ceci à cause de sa participation à des activités politiques de la gauche étudiante hostiles au gouvernement conservateur de l’amiral Horthy. C’est ainsi qu’il se trouve contraint, par le régime autoritaire de l’amiral Horthy, à quitter la Hongrie en échange de sa libération.
De ce fait il quitte Budapest à l’âge de 18 ans pour travailler à Berlin comme apprenti développeur dans un laboratoire photo. En 1933 l’arrivée d’Hitler au pouvoir, pousse Friedmann à quitter l’Allemagne pour l’Autriche. Mais là aussi,la montée du fascisme le pousse à partir s’installer à Paris dans l’espoir de poursuivre sa carrière de journaliste indépendant.
Capa, l’exil, la révolution et Paris
Terrasse du café Capoulade en 1943 pendant l’occupation allemande
Dans les cafés de Montparnasse, il fait la connaissance d’Henri Cartier-Bresson, ainsi que d’autres Juifs émigrés comme lui. Il prend la décision de franciser son prénom et se fait désormais appeler « André Friedmann ». Épais sourcils, yeux et cheveux noirs, lèvres charnues, son charme est immense.
En septembre 1934 c’est dans le quartier latin, à la terrasse du café Capoulade, qu’il fait la connaissance de Gerda Taro. Gerda est une jeune étudiante allemande d’origine polonaise, profondément antifasciste qui souhaite devenir photographe. Gerda Taro et André Friedmann deviennent amants en 1935. Le couple fréquente l’Association des écrivains et artistes révolutionnaires, tout comme leurs principaux amis ou collègues photographes.
Gerda Taro, l’atout cœur de Capa
Robert Capa avec Gerda le grand amour de sa vie à Paris en 1936.
En 1936, André a du mal à trouver du travail et ses photos se vendent très mal. De ce fait Gerda imagine un photographe américain dont Friedmann ne serait que l’assistant. Et c’est ainsi elle lui fait prendre le pseudonyme de “Robert Capa”. Ce nom sonne plus américain et il est aussi plus facile à prononcer. A partir de ce pseudonyme, il crée un personnage, celui d’un photographe américain, chic, riche et mondain. Il se présente maintenant comme un célèbre photographe américain. Et ça marche, puisque Capa réussit à décrocher un travail de photojournaliste.
Sa première mission le conduit au Danemark pour photographier un discours de Léon Trotsky. En 1936 sa carrière décolle notamment grâce à ses photographies de la guerre civile espagnole. En effet ces photos de Capa vont véritablement attiré l’attention du monde.
Capa et la guerre d’Espagne
Barcelone 19 juillet 1936. Barricade après le soulèvement nationaliste en Espagne.
En août 1936, Capa part avec Gerda Taro pour les magazines “Vu” et “Regards”, couvrir la guerre civile espagnole sur le front républicain. En effet Capa veut photographier la résistance du gouvernement républicain aux rebelles fascistes du général Francisco Franco. Lors de ce premier séjour, Cap ne photographie pas les combats et s’attache surtout à réaliser des portraits de combattants républicains à l’équipement rudimentaire.
Son travail est animé par une grande ferveur politique. Et c’est ainsi qu’il oriente son travail sur la motivation de femmes combattantes militantes en photographiant des miliciennes à l’entrainement. La presse apprécie unanimement cette série d’images sur ces femmes.
En Espagne, il devient militant antifasciste et s’investit pleinement pour dénoncer le sort des populations qui subissent les bombardements et les Brigades internationales. Son reportage “La Capitale crucifiée” le fait entrer dans l’histoire du photojournalisme. De ce fait le 19 décembre 1936 le reportage est publié dans “The Illustrated London News”. Même l’Exposition universelle de 1937 expose les clichés de Capa aux côtés des œuvres d’artistes comme Miro, Picasso, Bunuel ou Calder.
“The falling soldier” chef d’oeuvre et polémique
“The falling soldier” Mort d’un soldat républicain. Robert Capa 1936
C’est en Espagne que Capa prend la photo qui lui vaudra une renommée internationale. C’est cette image qui est à l’origine du mythe Capa. Intitulée “Mort d’un soldat républicain”, elle représente un soldat en chemise blanche, s’effondrant après avoir été touché par une balle. Cet instantané semble capturer l’instant de la mort. A la fois horrible et captivante, elle capte immédiatement l’attention du spectateur en fixant l’instant d’un moment tragique.
Cette photo qui symbolise la guerre d’Espagne entre dans la mémoire collective. Cependant une polémique naît en 1970 pour contester l’authenticité de la photo. Cette photo fait l’objet de nombreux débats car de nombreux sceptiques tentent de prouver qu’elle est mise en scène.
Ce débat provoque un engouement supplémentaire autour de la photo. De ce fait elle devient un symbole source de débat autour de la mort et de la guerre. Le sujet et le scandale font de cette photo l’une des photographies les plus discutées de tous les temps. Toutefois une enquête approfondie permet de découvrir l’identité du soldat.Il s’agit en fait du militant anarchiste Federico Borrell Garcia qui fut effectivement tué le 5 septembre 1936, le jour où Capa a pris la photo. De ce fait, “The Falling Soldier” est un chef‑d’œuvre incontournable du photojournalisme, peut-être même la plus grande photographie de guerre jamais réalisée.
La mort de Gerda Taro
L’annonce de la mort de Gerda Taro dans la presse française.
Alors que Capa revient à Paris, Gerda Taro est restée en Espagne pour couvrir le conflit. Le 26 juillet 1937 Gerda meurt à l’age de 27 ans, écrasée accidentellement par un char républicain pendant la bataille de Brunete. Jusqu’à la fin de sa vie, Capa aime à dire que Gerda et lui sont unis par le mariage. La photographie de Robert Capa représentant Gerda Taro se reposant sur une borne kilométrique aux initiales PC illustre l’article consacré à sa mort dans le journal “Ce soir”. D’ailleurs elle va naturellement devenir l’icone antifasciste du parti communiste Français.Suite à la mort de Gerda, Robert capa restera inconsolable.Le 1er août 1937 ce sont 10.000 personnes qui se réunissent au cimetière du Père-Lachaise, à Paris, pour lui dire adieu. La compagne de Robert Capa aurait dû célébrer ce jour là ses 27 ans. C’est Louis Aragon en personne qui prononce l’éloge et Alberto Giacometti qui dessine sa tombe.
Malgré cela le temps passe et son travail tombe vite aux oubliettes. Et pourtant, sans l’intelligence de Gerda Taro, Robert Capa ne serai probablement pas devenu l’un des plus grands photoreporter de l’histoire.
Gerda Taro en Espagne, juillet 1937.
Robert Capa dans la tourmente de la seconde guerre mondiale
En octobre 1939 de nouveau confronté à l’antisémitisme et aux lois française contre les “étrangers indésirables” et la montée de antisémitisme, Capa préfère quitter Paris. Il traverse l’Atlantique pour s’exiler à New York où il rejoint sa mère et son frère, Cornell.
Cap sur l’Afrique du Nord et la Sicile
Sicile 1943, un jeune soldat américain et un vieux berger sicilien, qui montre la route prise par les Allemands. Photo Robert Capa.
En 1942 à New York, le magazine “Collier’s” charge Robert Capa de couvrir le front d’Afrique du Nord. Ensuite il part suivre part le débarquement des troupes alliées en Sicile pour le magazine Life. Ses photos montrent le courage et la souffrance de la population sicilienne à travers la guerre. Il prend des photos partout où c’est possible en accompagnant les soldats américains.
D’ailleurs c’est près de Sperlinga, un petit village sicilien, que Robert Capa prend la photo symbole du débarquement en Sicile. Sur cette photographie on y voit un jeune soldat américain accroupi près d’un vieux berger sicilien, qui montre la route prise par les allemands.
Par la suite Capa va perdre son contrat avec le magazine “Collier’s”. En effet à cette époque Capa suit le 2e corps d’armée du général Patton. Il assiste notamment à la victoire d’El Guettar en Tunisie. Malheureusement pour capa ses bobines de films photographiques arrivent avec plus de trois mois de retard.
Robert Capa dans l’enfer d’Omaha
Barge de débarquement en approche sur Omaha Beach.
“Ma belle France était repoussante et horrible. Les hommes de mon bateau pataugeaient dans l’eau jusqu’à la taille, leurs fusils prêts à tirer, les poteaux jaillissaient de la mer et la plage fumait en arrière-plan, tout cela était parfait pour la photographie.” Robert Capa
Le 6 juin 1944, Capa est le seul photographe présent sur Omaha Beach lors de la première vague d’assaut du débarquement allié en Normandie. Il arrive sur le secteur désigné “Easy Red” face à Colleville-sur-Mer. Et c’est là que pendant une heure trente il photographie la guerre au plus près, avec ses deux Contax 24x36 et un Rolleiflex 6x6, sous les obus et entre les balles.
Aux côtés des soldats, il prend cent dix neuf photos. Cependant, un laborantin de Life pressé par le temps, ferme dans sa hâte la porte de l’appareil de séchage. L’émulsion des pellicules fond. Finalement, il ne reste que onze photos à peu près acceptables, mais plutôt floues. Cette série de photographies est connue sous le titre de “Magnificent Eleven”. En quête de justification, “Life” publie les photos dans son éditiondu 19 juin 1944 en signalant que l’excitation et la nervosité du photographe sont la cause des problèmes de netteté.
Couverture de Life du 19 juin 1944 avec le général américain Dwight D. Eisenhower
L’une des photos emblématique prises par Capa, le jour J, est celle d’un soldat qui à peine sorti de sa barge, cherche à rester hors de l’eau alors que le poids de son arme le gêne. La plage d’Omaha, la plus meurtrière du jour J sera ensuite surnommée « Omaha la sanglante ». La photo, assez floue pour les raisons évoquées précédemment, mais bien cadrée, est légendée par Life,“Slightly out of focus” (“Un peu floue”), titre que Capa reprendra en 1947 pour son autobiographie.
Robert Capa et la polémique du D Day
Cependant cette version Officielle est remise en cause en 2014 par le critique new-yorkais Coleman et le rédacteur en chef de Life John G. Morris qui relèvent plusieurs incohérences. Selon eux, les onze photos connues aujourd’hui sont les seules que Capa ait prises durant le débarquement. L’histoire du laborantin maladroit est une invention destinée à construire la légende d’un Capa héroïque auteur d’une centaine de clichés durant les six heures de la bataille, alors qu’il n’y serait resté qu’entre trente minutes et une heure et demie.
La fin de la seconde guerre mondiale
De Paris à Berlin, en passant par Leipzig
Pendant la Libération de Paris, Leclerc interdit aux correspondants de guerre de suivre les troupes de la 2e DB. Robert Capa lui peut le faire grâce aux hommes de “La Nueve”, la 9e compagnie du régiment de marche du Tchad. Cette compagnie se compose en majorité d’espagnols anti-franquiste, intégrés aux troupes françaises. Les soldats prennent alors Capa sur un de leurs halftracks baptisé “Teruel”. Ce nom est celui de la bataille entre les républicains et les nationalistes que Capa couvre pendant la guerre d’Espagne.
Plus tard Robert Capa veut à tout prix couvrir la libération de Leipzig. En effet car cette ville allemande est celle qui a vu naître Gerda Taro. De ce fait le 18 avril 1945 il est à Leipzig, et suit le soldat Bowman et d’autres troupes qui luttent pour sécuriser un pont depuis un immeuble d’habitation. A un moment, alors qu’il recharge sa mitrailleuse, Bowman es tué par un tireur d’élite allemand. Le photographe de guerre est ses côtés. Robert Capa capture les derniers instants de Bowman, en prenant plusieurs photos à quelques minutes d’intervalles.
Ces photos vont avoir une renommée internationale dans le magasine Life avec pour légende “Le dernier homme à mourir”. En effet ces photographies sont considérés comme celles du dernier GI’s de la Seconde Guerre mondiale à être abattu au combat sur le sol européen. Le 7 septembre 1945, Capa photographie les ruines de Berlin, et surtout la célébration du nouvel an juif.
Robert Capa photographie toujours un peu trop prés
Robert Capa, mai 1954 — Sur le chemin de Nam Dinh à Thai Binh, l’un des derniers reportages de Robert Capa
En tant que photojournaliste, Capa est le témoin direct de cinq guerres : la guerre civile espagnole, la seconde guerre sino-japonaise, la seconde guerre mondiale, la guerre israélo-arabe de 1948 et la première guerre d’Indochine.
Au cours de ces conflits, Capa a assisté à un nombre impressionnant d’événements. En effet ses photos raconte la libération de la France, de la bataille de Normandie aux célébrations de la libération de Paris. Ils traitent également de nombreux sujets comme les effets de la guerre sur les civils ou les soldats laissés morts morts dans le sillage de la destruction.
Après la Seconde Guerre mondiale, en partie traumatisé par les monstruosités dont il a été témoin, Capa ne se croît plus capable de couvrir une guerre. Cependant, il va continuer à faire connaître au monde les conflits qui se déroulent aux quatre coins de la planète en créant l’agence photo Magnum en 1947.
En 1954, le magazine Life a besoin d’un photographe pour couvrir la guerre d’Indochine. Se trouvant alors au Japon pour une exposition de Magnum, Robert Capa se porte volontaire. Ainsi, c’est aux côtés des troupes françaises qu’il parcourt le Vietnam, une partie de l’Indochine française de l’époque.
Le 25 mai 1954, au Tonkin, dans le Nord Vietnam actuel, Capa veut prendre une photo d’ensemble d’un groupe de soldats français. Alors il s’écarte du chemin où progresse la troupe, et c’est là qu’il met le pied sur une mine antipersonnel. Robert Capa succombera à ses blessures. À titre posthume, la France lui décernera la Croix de guerre des théâtres d’opérations extérieurs. Robert Capa est enterré au cimetière d’Amawalk près de New York.
Inchochina, NAM DINH. Mai 1954 — Chargement du cercueil de Capa dans un avion de la base aérienne de Nam Dinh en route pour Hanoi